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Alain Legout

Fondateur de 

BIOMESPACE

Interview dans l'edition Visionnaires du 21e siecle édition 2024

www.interviewfrancophone.net

par Ingrid Vaileanu

Interview Francophone : Comment peut-on résumer votre carrière et vos convictions qui peuvent inspirer le développement local au 21e siècle? 

Alain Legout : Je dirais que ma carrière s’est construite autour de rencontres décisives et d’un constat partagé : face aux défis contemporains — rareté des ressources, coûts croissants, baisse de la qualité de la main-d’œuvre, enjeux énergétiques et hydriques — il est devenu indispensable de repenser la façon de bâtir. Cela fait plus de dix ans que je suis actif dans la promotion immobilière, et au fil du temps, j’ai croisé des experts, comme Joaquim, spécialisé dans la construction modulaire en structure acier, qui partageaient le même regard critique et la même volonté de faire évoluer les pratiques.

Ensemble, nous avons réalisé que le modèle traditionnel du bâtiment ne pouvait plus répondre aux exigences du 21e siècle. La construction doit désormais adopter une approche plus agile, plus raisonnée, en privilégiant des méthodes, des matériaux et des partenariats qui garantissent non seulement une qualité durable, mais aussi une gestion responsable des ressources. Cette vision peut inspirer le développement local en encourageant les acteurs à innover, et à placer la durabilité et la résilience au cœur de chaque projet. En somme, mon parcours incarne la conviction profonde qu’il est possible — et nécessaire — de réinventer la construction pour mieux répondre aux réalités de notre époque.

Interview Francophone : Quels sont les projets qui vous ont marqué le plus et pourquoi et comment peut on résumer Biome Space ? 

 

Alain Legout : Je dirais que l’un des projets qui m’a le plus marqué est sans doute ITER. Ce projet international est un pari sur l’avenir : il anticipe les besoins énergétiques à long terme, tout en ouvrant la voie à des technologies plus propres et plus performantes. Il exige de penser notre rapport à la technique et à l’innovation dans une perspective de temps long, tout en prenant des risques pour proposer des solutions pérennes et durables. ITER nous montre qu’écologie et progrès ne sont pas antinomiques, mais bien complémentaires : la finalité de la technologie devrait être de construire un futur plus respectueux de la planète, pas de s’y opposer.

En ce qui concerne BiomeSpace, je le résumerais comme une approche "naturetech". Il s’agit d’un concept qui utilise les nouvelles technologies dans le respect de la nature, avec pour ambition de ne pas créer d’emprise négative sur l’environnement. BiomeSpace se distingue notamment par une triple autonomie — en énergie, en eau et en sanitaire — lui permettant de s’intégrer harmonieusement dans son écosystème, sans puiser indéfiniment dans les ressources ou générer des pollutions inutiles. C’est un modèle qui illustre parfaitement la possibilité de repenser la construction et le développement local, en conciliant innovation, responsabilité et harmonie avec le vivant.

Interview Francophone: Comment voulez vous faire évoluer le rôle de l'innovation Biome Space pour répondre à l'intérêt commun et à des intérêts spécifiques à la fois de chaque citoyen et des parties prenante (pour " la création de valeur partagée sans diviser " au sens du nouveau modèle économique de l'économie de la fonctionnalité -ou le territoire peut avoir plusieurs fonctionnalité et donc les habitations ne doivent pas être pérenne pour réduire leur empreinte écologique ?

 

Alain Legout : Notre ambition avec Biomespace est de concilier l’intérêt collectif – préserver et valoriser le territoire – avec les besoins spécifiques de chaque citoyen et des différentes parties prenantes. Il ne s’agit plus simplement d’ériger des infrastructures figées, mais de créer des espaces de vie capables d’évoluer, de se transformer et de s’intégrer de manière harmonieuse à leur environnement.

La question n’est pas de savoir si un habitat doit être pérenne : il doit avant tout être durable. Un logement non durable génère des déchets et une empreinte écologique négative. L’enjeu réel consiste à ne plus « artificialiser » les sols. Biomespace répond à ce défi en proposant des habitats sans emprise au sol, sans dalle béton, préservant la biodiversité locale et minimisant l’impact sur les ressources. Grâce aux vis de fondation, le terrain demeure naturel et vivant, sans imperméabilisation ni dégradation. Mieux encore, ces habitats sont déplaçables, ce qui offre une flexibilité fonctionnelle au territoire : les usages peuvent évoluer sans laisser de traces permanentes.

En somme, Biomespace permet de penser l’habitat comme un élément intégré d’un écosystème plus large, au centre duquel on retrouve un nouvel équilibre entre développement humain, respect de la nature et adaptation aux besoins futurs.

Interview Francophone : Comment envisager le territoire au 21e siècle sans le morceler en zonne à forte intensité productive et zone protégée mais en envisageant les possibles évolutions des fonctionnalités du territoires et surtout la multifonctionnalité du territoires createur de valeur partagée sans diviser (par exemple une parcelle agricole peut etre à la fois source de protection de la biodiversité , source de production, paysage touristique, lieu d'implantation des sources d'energie, etc... ) 

Alain Legout: Je pense qu’au 21e siècle, il faut repenser le territoire comme un espace vivant, dynamique et multifonctionnel. Plutôt que de le segmenter en zones ultra-urbanisées d’un côté et agricoles ou naturelles de l’autre, nous devons envisager des territoires capables d’accueillir simultanément plusieurs usages et fonctions. Une même parcelle agricole, par exemple, peut contribuer à la protection de la biodiversité, produire des ressources alimentaires, servir de paysage touristique, et même accueillir des sources d’énergie renouvelable. Cette approche repousse l’idée que chaque espace doit être assigné à un usage unique et figé.

Prenons le cas de la loi ZAN (Zéro Artificialisation Nette) en France : bien qu’elle parte d’une intention louable — limiter la destruction des sols et la perte de biodiversité — elle présente le risque de concentrer la population dans des zones déjà denses, augmentant la pression sur ces milieux. Nous devons au contraire envisager des solutions qui permettent de vivre avec la nature, et non pas à côté. Cela signifie adopter des techniques constructives et des aménagements qui, au lieu de figer et d’artificialiser les sols, laissent la possibilité à la faune et à la flore de s’épanouir.

L’enjeu est donc de ne pas percevoir les territoires de manière unidimensionnelle, mais de favoriser des usages complémentaires, adaptables et évolutifs. Cette multifonctionnalité crée une véritable valeur partagée, car elle ne repose pas sur une logique de division, mais sur une logique d’harmonisation entre les besoins humains, la préservation de l’environnement, et le développement des activités économiques et sociales. C’est ainsi que nous pourrons faire émerger un modèle de territoire plus résilient, plus équilibré et plus juste au 21e siècle.

 

Interview Francophone : Comment intégrer les innovations (surtout la transition numérique et écologique)  qui sont au coeur des evolutions et leurs impacts locaux et comment intégrer tous les avis et des doléances des citoyens et de toutes les parties prenantes pour un role efficace et ethique des maires qui vont accueillir vos projets BiomeSpace (grace à des outils de qualification ouverte - IA QUALIFICATIVE - une nouvelle typologie IA découverte en France (Paun, 2023 - www.florin-paun.com) ? 

Alain Legout : Intégrer les innovations numériques et écologiques dans les territoires suppose avant tout de repenser notre relation à la nature et de favoriser une gestion raisonnée des ressources. Avec Biomespace, nous ne cherchons pas à imposer une construction « intelligente » uniquement pour le confort individuel, mais plutôt pour atteindre un équilibre entre l’habitat et son environnement. Cela passe par la domotique : une gestion en circuit fermé, maîtrisée et éthique, de l’énergie, de l’eau et des autres ressources, afin de réduire drastiquement le gaspillage et la pollution. L’habitation devient ainsi un élément actif de son écosystème, non un simple réceptacle passif.

Avec BiomeSpace, l’innovation ne se limite pas à une gestion interne des ressources : elle s’étend jusqu’au partage d’informations en temps réel avec les organismes de contrôle sanitaire. Concrètement, grâce à des capteurs intégrés au système (qualité de l’eau, mesures sanitaires, niveaux d’énergie, performances environnementales), des données fiables et à jour sont automatiquement transmises aux agences de santé et de conformité.

Cette télétransmission permet aux autorités compétentes d’assurer un suivi continu sans attendre une inspection sur site. Elles peuvent ainsi intervenir rapidement en cas d’anomalie, fournir des recommandations et s’assurer que les normes sanitaires et environnementales sont strictement respectées. En d’autres termes, l’habitat ne se contente pas de gérer ses ressources de façon autonome et éthique, il entretient aussi un dialogue permanent avec les instances chargées de la sécurité, de la santé et de la qualité de vie, garantissant aux habitants un cadre sûr et conforme aux standards les plus exigeants, à même de rassurer les citoyens et élus.

Interview Francophone: Pour renforcer les décisions par concertation des maires  et la décentralisation - grace aussi aux découvertes francaises (les innovations francaises recentes qui apportent des solutions - brevets francais- aux verroux technologiques du stockage et distribution de l'hydrogene) les maires peuvent devenir les acteurs de l'independance energétique des territoires grace à l'hydrogenisation des economies - que les  les innovations francaises comme Biome Space  rendent possibles, accessibles pour transformer la France dans l'un des leaders de l'hydrogenisation des economies au service des citoyens 

Alain Legout : De notre côté, l’un des exemples les plus prometteurs réside dans l’utilisation de batteries nickel-hydrogène, dont nous sommes en train de tester l’intégration dans nos solutions. Ces batteries présentent plusieurs avantages notables : résistance aux variations de température, elles supportent sans difficulté les écarts thermiques, ce qui les rend parfaitement adaptées à une utilisation en extérieur, ou dans des contextes géographiques variés ; stabilité et longévité, grâce à leur conception, ces batteries affichent une durée de vie pouvant atteindre une trentaine d’années, et ce, avec un très faible taux de perte d’efficacité au fil du temps ; sécurité accrue enfin, le procédé de fabrication de ce type de batterie est considéré comme particulièrement sûr, réduisant les risques liés au transport, à la manipulation et au stockage de l’énergie.

Biomespace s’inscrit dans cette dynamique d’innovation permanente. Notre démarche consiste à intégrer progressivement les nouvelles technologies respectueuses de l’environnement, afin de proposer des solutions énergétiques plus propres, plus résilientes et mieux adaptées aux réalités des territoires. Les maires, en tant que garants de l’intérêt général, peuvent ainsi s’appuyer sur ces outils pour prendre des décisions éclairées, bâtir des modèles de concertation plus solides, et faire de la transition énergétique un véritable levier de développement et d’autonomie pour leurs administrés.

Interview Francophone : Comment envisagez -vous l'evolution de la fonction d'une maison Biome Space au 21e siècle? 

 

Alain Legout : Je vois l’évolution du secteur de la construction comme le passage d’un habitat statique vers un concept modulable, flexible et totalement intégré dans son environnement. Au 21e siècle, l’objectif n’est plus simplement de « construire une maison » telle qu’on l’entend traditionnellement. Il s’agit plutôt de concevoir des espaces de vie intelligents, durables et évolutifs, que nous appelons « Biomespace ».

Grâce à leur conception modulaire, ces Biomespace peuvent être adaptés à une multitude d’usages : habitat individuel ou collectif, commerces et services, avec des boutiques, des crèches, des écoles, des bureaux, le tout dans des modules fonctionnels et transportables, et enfin, des espaces multifonctionnels. Cela revient à créer des ensembles architecturaux plus vastes, en assemblant plusieurs modules pour donner naissance à de grand bâtiments ou à des ensemble de modules connectés, sans emprise définitive sur le sol, préservant ainsi la faune, la flore, et limitant l’artificialisation.

Le caractère autonome et durable de ces unités, leur capacité à fonctionner en boucle fermée (énergie, eau, déchets) et leur facilité de déplacement sans laisser de trace, permettront de repenser la manière dont nous concevons l’habitat. À la fin du 21e siècle, je souhaite que « construire un bâtiment » revienne à assembler des biomespace, capables de répondre aux besoins changeants des populations et des territoires, sans sacrifier l’environnement ni enfermer les usages dans un schéma figé.

Interview Francophone : Quels sont vos meilleurs expereinces en tant qu'entrepreneur innovant  et quels sont les défis auquels vous avez envie de répondre par des innovations inspirantes et des solutions de resilience ? 

Alain Legout : Ma meilleure expérience, en tant qu’entrepreneur innovant, est sans doute le chemin parcouru au quotidien. Chaque journée apporte son lot d’échanges, de remises en question et d’apprentissages, et c’est précisément ce mouvement constant vers l’amélioration qui me motive. Il ne s’agit pas d’un moment précis, mais bien d’un processus continu : tester, échouer parfois, réussir souvent, et toujours avancer avec conviction.

Le principal défi que nous avons à relever est liés au décalage entre les réglementations actuelles, pensées pour un monde d’hier, et les enjeux du monde de demain. Les mentalités, tant au niveau des décideurs que des administrations, restent souvent figées dans un schéma ancien, empêchant ainsi l’émergence de nouvelles approches plus durables. Il est urgent d’adapter nos lois et nos pratiques à la réalité de l’époque : raréfaction des ressources, nécessité de préserver l’environnement, et besoin de solutions plus ingénieuses.

Un exemple frappant est la question de l’eau. Aujourd’hui, les systèmes et législations en place sont trop souvent rigides, privilégiant des modes de distribution et de traitement dépassés, voire polluants. Cette vision dogmatique, qui vise à protéger un modèle figé, empêche parfois de reconnaître des alternatives plus efficaces et écologiques. Or, dans le futur, l’eau sera probablement la ressource la plus rare, la plus stratégique, et même la cause des prochaines guerres. Nous devons donc la préserver, l’économiser et assurer sa qualité. Mes projets cherchent à apporter des réponses innovantes à ces enjeux, mais se heurtent à la réticence de ceux qui peinent à s’engager dans une évolution pourtant nécessaire.

Interview Francophone : Quel est votre conseil et souhaits pour les générations du 21e siècle des maires et des citoyens? 

 

Alain Legout : Je dirais aux maires et aux citoyens du 21e siècle : osez penser autrement. Ne restez pas prisonniers d’un schéma figé où la nature serait simplement un décor ou une contrainte. Vivre en harmonie avec notre environnement, c’est non seulement possible, mais c’est également la voie la plus durable et la plus souhaitable. Il ne s’agit pas de s’entasser les uns sur les autres, ni de se couper de la biodiversité qui nous entoure. Au contraire, nous pouvons vivre mieux en comprenant que les espaces dans lesquels nous évoluons — qu’il s’agisse de terrains agricoles, de zones urbaines ou d’espaces naturels — peuvent et doivent répondre à plusieurs fonctions.

Pourquoi une parcelle agricole ne pourrait-elle pas être à la fois nourricière, réservoir de biodiversité, espace de détente, et même source d’énergie renouvelable ? Les ressources que nous avons à notre disposition sont précieuses, et notre devoir est d’en tirer le meilleur parti, non pas en les exploitant sans limite, mais en les intégrant intelligemment dans un système plus riche, plus souple et plus harmonieux.

Mon conseil est donc de rompre avec la vision qui cloisonne les usages et oppose les activités. Au contraire, encourageons la diversité fonctionnelle des territoires. Cela signifie donner aux maires, aux citoyens et aux entreprises, la liberté d’innover, d’expérimenter et de coopérer afin de redessiner des espaces de vie partagés et résilients. Mon souhait est que cette génération — et celles qui suivront — embrassent cette approche, car c’est en apprenant à vivre avec la nature, plutôt que séparés d’elle, que nous bâtirons un avenir à la fois prospère, solidaire et respectueux.

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